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Changement de PLU : pas nécessairement la tuile !


Par Maître Julie DESORGUES


Votre terrain est devenu inconstructible à la suite d’une modification du document d’urbanisme (carte communale ou Plan local d’urbanisme (PLU)) et vous vous interrogez sur les armes dont vous disposez pour contester ce classement ?





Tout n’est pas perdu, des solutions juridiques ouvertes en la matière existent. Il vous est donc possible d’intervenir.


I. Attaquer la délibération approuvant le document d’urbanisme (carte communale / PLU)

Pour contester le classement d’une parcelle en zone inconstructible, la première action à mettre en œuvre est de contester la délibération de la Commune concernée, approuvant le document d’urbanisme (PLU ou carte communale).


Cette contestation s’effectue dans le cadre d’un recours contentieux introduit devant le Tribunal administratif territorialement compétent, pour demander au juge l’annulation du PLU ou de la carte communale. Ce recours peut être précédé d’un recours gracieux auprès de la Commune mais en pratique, ce recours gracieux présente peu d’utilité.

Pour être recevable, le recours contentieux doit être formé dans un délai de deux mois à compter de sa publication et de la mention faite de cette publication dans un journal du département concerné.


Si vous obtenez du juge l’annulation du document d’urbanisme, la Commune sera contrainte de procéder à l’élaboration d’un nouveau document d’urbanisme ; élaboration au cours de laquelle vous pourrez présenter vos observations et faire valoir vos droits.

Enfin les procédures d’élaboration des documents d’urbanisme présentant un coût important pour les collectivités, ces dernières cherchent à éviter les contentieux et pourraient donc être plus encline à prendre en compte vos demandes.


L’inconvénient de cette première solution, réside dans le délai très court dans lequel ce recours en annulation est enfermé.

Mais rassurez-vous, si le délai de deux mois est expiré, vous disposez toujours des solutions suivantes.



II. Former un recours indemnitaire pour demander l’indemnisation du préjudice subi du fait de l’illégalité éventuelle de la carte communale

Si la délibération adoptant le document d’urbanisme n’a pas fait l’objet d’un recours, il est juridiquement possible de former un recours indemnitaire pour solliciter des dommages et intérêts nés du préjudice dû au déclassement d’un terrain.

Pour que ce recours soit valable, il convient :

· De prouver que le document d’urbanisme (carte communale ou PLU) est illégal et que cette illégalité vous a causé un préjudice ;

· D’introduire cette demande avant la prescription de cette action, soit dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis (en ce sens la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics).

Attention, cette solution ne permettra pas de rendre « constructible votre terrain », mais elle vous permettra d’obtenir des dommages et intérêts.



III. Faire une demande d’autorisation d’urbanisme et attaquer le refus en invoquant par la voie de l’exception l’illégalité la carte communale

Une troisième option est ouverte en la matière, lorsque les solutions précédentes ne peuvent plus être mises en œuvre.

Il s’agit, dans un premier temps, de déposer une demande de permis de construire, ou une déclaration préalable (conseillée car plus souple qu’une demande de permis de construire), ou un certificat d’urbanisme opérationnel.

En tout état de cause, cette demande fera l’objet d’un refus de la part de la Commune concernée du fait du caractère inconstructible de votre terrain.

Dans un second temps, vous demandez l’annulation de ce refus devant le Tribunal administratif en invoquant l’illégalité du document d’urbanisme.

Si cette option a le mérite de faire pression sur la Commune, et si vous obtenez l’annulation du refus, vous pourrez certes entreprendre la réalisation du projet demandé mais :

· D’une part, le document d’urbanisme trouvera toujours à s’appliquer ;

· D’autre part, votre terrain ne sera pas classé dans le document graphique de la Commune en zone constructible ;

· Enfin, la reconnaissance juridictionnelle de l’illégalité au fond de la carte communale reste soumise à un fort aléa judiciaire.

Cette option demeure toutefois envisageable si vous disposez d’un projet de construction, et pour se « constituer » des preuves quant à la nécessité de classer ultérieurement votre parcelle en zone constructible.



IV. Demander l’abrogation de la carte communale et attaquer le refus de la Commune

Une autorité administrative saisie d’une demande tendant à l’abrogation d’un règlement illégal, est tenu d’y déférer, soit que ce règlement ait été illégal dès la date de sa signature, soit que l’illégalité résulte de circonstances de droit ou de fait postérieures à cette date (CE, 3 février 1989, n° 74052article L. 243-2 du Code des relations entre le public et l’administration), et ce sans condition de délai.

En matière de document d’urbanisme (PLU ou carte communale), pour que la demande d’abrogation soit fondée, il convient de faire la démonstration de l’illégalité du document d’urbanisme.

Une fois cette démonstration faîte, le refus du Maire de donner suite à votre demande d’abrogation est attaquable devant la juridiction administrative.

Dans le cadre de ce recours, l’annulation de la décision de refus d’abrogation sera demandée au motif que le document d’urbanisme est illégal.

Cependant, en matière de contrôle sur le zonage opéré par une Commune, le juge administratif ne sanctionne que l’erreur manifeste d’appréciation.

Autrement dit, la Commune a une marge de manœuvre importante dans le choix qu’elle fait de rendre ou non telle ou telle parcelle constructible.

Pour déterminer si un tel recours possède de plus grandes chances de succès, il convient d’examiner attentivement l’entier dossier d’élaboration du document d’urbanisme afin de déterminer si ce document d’urbanisme est entaché d’un vice substantiel, pouvant justifier l’annulation du refus d’abrogation.

Enfin, s’il apparaît que la carte communale est entachée d’un tel vice, le juge pourra alors sanctionner le refus d’abrogation et la Commune sera contrainte d’adopter une nouvelle carte communale, ou un PLU.

Cependant, je me dois de vous indiquer qu’elle n’aura nullement l’obligation de classer votre terrain en zone constructible dans le nouveau document d’urbanisme adopté mais vous disposerez toutefois d’un argument juridique fort dans la « négociation ».



V. Intervenir lors de la prochaine modification de la carte communale ou de l’adoption d’un PLU

La dernière action ouverte est d’intervenir lors de la prochaine procédure de modification de la carte communale ou d’adoption d’un PLU par la Commune concernée.

Comme précédemment expliqué, ces procédures sont coûteuses et contraignantes pour les Communes, qui veulent éviter au maximum des recours contre leur document d’urbanisme.

Il est donc intéressant de savoir si une telle modification est en cours et/ou prévue, dans la Commune vous intéressant, et d’y intervenir en faisant valoir vos droits et observations lors de son lancement.

Bien évidemment, eu égard à la complexité de la matière et de ces différentes solutions, nous pouvons vous accompagner dans vos démarches et vous conseiller au mieux en fonction des faits entourant votre situation et de vos objectifs.


Maître Julie DESORGUES

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